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La Norvège a entériné vendredi la décision de retirer son fonds souverain, le plus gros au monde, du charbon, une avancée majeure pour les défenseurs de l'environnement à l'approche de la conférence de Paris sur le climat et qui pourrait faire des émules.
A l'unanimité, le Parlement norvégien a décidé que le fonds de près de 7.000 milliards de couronnes (793 milliards d'euros), qui contrôle 1,3% de la capitalisation boursière mondiale, devrait se désengager des entreprises minières ou des groupes d'énergie pour lesquels le charbon représente plus de 30% de l'activité ou du chiffre d'affaires.
La décision de retrait, qui fait suite à un compromis trouvé au sein de la Commission des Finances le 27 mai, devrait concerner entre 50 et 75 entreprises internationales, représentant des participations comprises entre 35 et 40 milliards de couronnes, selon les calculs du ministère des Finances.
Mais, selon les défenseurs de l'environnement, l'impact pourrait être encore plus important, certaines estimations faisant état de 122 entreprises représentant 67,2 milliards de couronnes.
Le nom des entreprises dont le fonds - investi dans plus de 9.000 sociétés - est appelé à se retirer d'ici au 1er janvier 2016 n'a pas été officiellement fourni.
Mais, selon une étude réalisée par un trio d'ONG, la mesure affectera 35 groupes américains dont Duke Energy, une douzaine de chinois, huit japonais, les géants allemands EON et RWE, le britannique SSE, l'indien Reliance Power, l'italien Enel, l'espagnol Endesa, le portugais EDP, le sud-africain Sasol, le sud-coréen Korea Electric Power, le suédois Vattenfall ou encore le danois Dong.
Étant donné la taille gigantesque du fonds norvégien, c'est une victoire importante pour la campagne internationale contre le charbon, énergie fossile particulièrement polluante, à quelques mois de la conférence sur le climat à Paris en décembre.
"Cela peut influencer la façon dont d'autres grands investisseurs perçoivent le charbon comme investissement", a noté Marianne Marthinsen, une députée de l'opposition travailliste. "C'est une décision que le reste du monde remarque".
Les élus norvégiens ont fait valoir que leur décision n'obéissait pas seulement à des considérations environnementales mais aussi à des impératifs financiers, les actifs dans le charbon étant condamnés à voir leur valeur chuter en cas d'accord international contre le réchauffement climatique.
Pour des raisons strictement financières, le fonds s'est de lui-même désengagé ces dernières années de dizaines d'entreprises (extraction de charbon, sables bitumineux, production de ciment...), estimant que leur modèle économique n'était plus tenable en raison de l'impact environnemental ou climatique.
- Les +Big 3+ épargnés -
Pour Truls Gulowsen, responsable de Greenpeace en Norvège, la décision norvégienne va "très vraisemblablement" faire des petits.
L'Église d'Angleterre, des groupes financiers comme Axa et des universités anglo-saxonnes comme Oxford et Stanford ont aussi annoncé récemment une sortie du charbon ou une réduction de leur exposition.
"Le charbon a toujours posé problème d'un point de vue moral en raison de ses effets sur le climat. Maintenant, même sa rentabilité est sous pression", a déclaré M. Gulowsen à l'AFP. "Je crois et j'espère que les jours du charbon sont comptés".
Les géants Anglo American, BHP Billiton et Glencore devraient cependant passer entre les mailles du filet en raison du poids énorme de leurs autres activités minières qui ramène le charbon sous la barre fatidique des 30%.
"Ensemble, les +Big 3+ ont produit 364 millions de tonnes de charbon l'an dernier et, une fois brûlé, ce charbon génère des émissions de CO2 représentant plus de 16 fois les émissions de gaz totales annuelles de la Norvège", a souligné Heffa Schücking, représentante allemande d'un groupe d'ONG.
La mesure d'exclusion ne concernera pas les groupes métallurgiques et ne sera pas non plus automatique en ce qui concerne les producteurs de charbon et les énergéticiens: si ceux-ci franchissent le cap de 30%, le fonds pourra tenir compte de leurs projets à venir avant de décider ou non de s'en désengager.
Des voix se sont élevées pour réclamer une initiative encore plus ambitieuse prônant des critères plus sévères, un désengagement du fonds - lui-même alimenté par les revenus pétroliers de l'État norvégien - de toutes les énergies fossiles, de même que des placements accrus dans les énergies renouvelables.
Paradoxalement, notamment pour des raisons de géopolitique face à une Russie de plus en plus présente dans la région, la Norvège a récemment accepté de sauver l'entreprise minière Store Norske qui extrait du charbon dans l'archipel reculé du Svalbard (Spitzberg) dans l'Arctique, en y injectant 500 millions de couronnes.
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