QUÉBEC, le 22 juill. 2024 /CNW/ - Après examen du
rapport produit par le Bureau des enquêtes
indépendantes (BEI), le Directeur des poursuites criminelles
et pénales (DPCP) conclut que l'analyse de la preuve ne
révèle pas la commission d'une infraction criminelle par une
policière et un policier de la Sûreté du Québec (SQ).
L'analyse portait sur l'événement entourant le décès d'un homme
à Clarendon le
5 juin 2023.
L'examen du rapport d'enquête préparé par le BEI a été
confié à une procureure aux poursuites criminelles et
pénales (procureure). Cette dernière a procédé à un examen
complet de la preuve afin d'évaluer si à la lumière de la preuve
retenue, celle‑ci révèle la commission d'infractions criminelles.
La procureure a rencontré et informé les proches de la personne
décédée des motifs de la décision.
Événement
Le 5 juin 2023, vers 10 h 57, un
appel est fait au 911 par une femme concernant un homme qui habite
sa propriété. Ce dernier est agressif et violent avec elle et son
conjoint. À 11 h 17, deux agents de la SQ
arrivent sur les lieux. Ces derniers leur demandent si l'homme a
des armes en sa possession. Le couple indique que non et que
l'homme se trouve présentement dans un cabanon situé dans la cour
arrière. En compagnie du couple, les agents se dirigent vers le
cabanon. L'endroit est peu éclairé, mais un des agents aperçoit
l'homme assis dans le cabanon face à la porte. Un des agents
s'approche du cabanon, s'identifie comme policier et demande à
l'homme de sortir afin qu'il puisse discuter. Une agente ainsi que
le couple se trouvent à proximité du premier agent. Lorsque l'agent
se trouve à environ 4 mètres du cabanon, l'homme ouvre la
porte, lève et pointe une arme longue en sa direction. L'agent se
trouve alors directement devant l'homme qui le vise avec son arme.
L'agent fait alors feu à quelques reprises en direction de l'homme.
Ce dernier tombe sur le dos à l'intérieur du cabanon et la porte se
referme. Les agents ne voient plus l'homme dans le cabanon.
Ils ordonnent au couple de retourner dans la maison et se
barricadent derrière des véhicules se trouvant sur le terrain.
À 11 h 43, une opération est mise en place afin
de pénétrer sécuritairement dans le cabanon. Le groupe
d'intervention est déployé. Après plusieurs tentatives vaines
d'entrer en contact avec l'homme, un drone est déployé à
l'intérieur du cabanon. Les agents découvrent l'homme atteint par
balle, couché sur le dos au sol. Des manœuvres de réanimation sont
faites, mais sans succès. Le décès de l'homme est constaté à
distance.
Analyse du DPCP
Dans la présente affaire, le DPCP est d'avis que les
conditions énumérées aux articles 25(1) et 25(3) du
Code criminel sont remplies.
L'article 25(1) accorde une protection à l'agent de la paix
employant la force dans le cadre de l'application ou l'exécution de
la loi, pourvu qu'il agisse sur la foi de motifs raisonnables et
qu'il utilise seulement la force nécessaire dans les
circonstances.
Il peut s'agir, notamment, d'une arrestation légale, ou encore
de manœuvres visant à désarmer une personne ou à maîtriser une
personne en crise, en raison du risque qu'elle représente pour
elle-même ou pour autrui.
L'article 25(3) précise qu'un policier peut, s'il agit sur
la foi de motifs raisonnables, utiliser une force susceptible de
causer la mort ou des lésions corporelles graves s'il croit que
cela est nécessaire afin de se protéger ou encore de protéger les
personnes sous sa protection contre de telles conséquences.
Les policiers, étant agents de la paix, sont donc autorisés à
employer une force qui, dans les circonstances, est raisonnable et
nécessaire pour exercer leurs fonctions et qui n'est pas
excessive.
Les tribunaux ont établi que l'appréciation de la force ne
devait toutefois pas être fondée sur une norme de perfection.
En effet, les policiers sont souvent placés dans des situations
où ils doivent rapidement prendre des décisions difficiles. Dans ce
contexte, on ne peut exiger qu'ils mesurent le degré de force
appliquée avec précision.
Dans ce dossier, l'intervention était légale et se fondait
principalement sur le devoir imposé aux policiers d'assurer la
sécurité et la vie des personnes présentes sur les lieux.
Considérant l'arme à feu en possession de l'homme, la proximité
physique d'agents et de civils de l'homme armé, l'état agressif et
violent dans lequel il se trouvait, les policiers avaient des
motifs raisonnables d'estimer que la force appliquée à l'endroit de
l'homme était nécessaire pour leur protection et la protection du
public contre des lésions corporelles graves ou la mort.
Conséquemment, le DPCP est d'avis que l'emploi de la force
par les policiers était justifié en vertu des articles 25(1)
et 25(3) du Code criminel. L'analyse de la preuve
ne révèle pas à son avis la commission d'une infraction criminelle
par la policière et le policier de la SQ impliqués dans cet
événement.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites
criminelles et pénales indépendant de toute considération de nature
politique, et ce, de façon à préserver l'intégrité du processus
judiciaire tout en assurant la protection de la société, dans la
recherche de l'intérêt de la justice et de l'intérêt public, de
même que dans le respect de la règle de droit et des intérêts
légitimes des personnes victimes et des témoins.
Chaque dossier soumis au DPCP est analysé avec rigueur et
impartialité. La norme qui guide les procureurs concernant
l'opportunité d'entreprendre une poursuite est prévue à la
directive ACC-3. En droit criminel, le fardeau de la preuve
que doit satisfaire la poursuite est très exigeant. En raison du
principe de la présomption d'innocence, la poursuite doit en effet
faire une démonstration hors de tout doute raisonnable de la
culpabilité de l'accusé devant le tribunal.
La décision de poursuivre ou non est une décision
discrétionnaire prise par le procureur dans l'exécution de ses
obligations professionnelles sans crainte d'ingérence judiciaire ou
politique et sans céder à la pression médiatique. Par ailleurs, ce
n'est pas la tâche du procureur de se prononcer sur une possible
faute civile ou déontologique. Il ne cherche que les éléments lui
permettant de conclure qu'un acte criminel a été commis et de
déterminer s'il peut raisonnablement en faire la preuve. Il ne lui
appartient pas non plus de formuler des commentaires ou des
recommandations concernant les méthodes d'intervention
policière.
La publication des motifs qui étayent la décision de ne pas
porter d'accusation dans certains dossiers revêt un caractère
exceptionnel et s'appuie sur des lignes directrices.
SOURCE Directeur des poursuites criminelles et pénales